• SEPTEMBRE
    Il y a une fête ce soir. Il a prévu d’y aller.
    Il est un peu en vrac. Il a quand même un picoler hier. Il est treize heures. Il est tard. La journée devrait passer assez vite jusqu’à ce soir. Il n‘a presque rien mangé la veille. Son estomac le lui rappelle. Alors que le café, lui serre les intestins, il se décide à se faire cuire un œuf. Et il se met à table.

    Il y a une fête ce soir. Il va y aller.
    Il prend une douche. Il est toujours un peu en vrac. Il met une chemise pour paraître plus présentable.

    Il y a une fête ce soir. Il n’y est pas allé.
    Trop de monde. Trop de monde qu’il ne connaît pas. Il ne sent pas d’être sociable.

    Elle l’a quitté, il y a deux ans. Un soir, il est rentré. Ils avaient pris l’habitude de boire un verre certains soirs en semaine. After work. Histoire de se détendre. Une bière en entrainant une autre ils terminaient souvent un peu pèté. Cette fois, après avoir terminé la première bouteille de blanc. Un petit vin cultivé en biodynamie. Mis en bouteille au domaine. Sans sulfite évidement. Château Lacoste dans le Luberon. Elle a simplement dit : « Je crois que je voudrais qu’on se sépare ».

    « Ok ?!! Pourquoi ? C’est un peu soudain.
    - Je ne sais pas…
    - On ne construit pas assez ?
    - Non.
    - Je ne te satisfais pas sexuellement ?
    - Arêtes.
    - J’ai fait quelque chose ? J’ai dit quelque chose ?
    - Non.
    - Simplement tu n’es plus amoureuse ?
    - Oui c’est ça.
    - Ok.
    -… »

    Ils étaient assis dans le séjour. Il s’est levé pour aller dans la cuisine. Il s’est dirigé vers le réfrigérateur. Il s’est retourné.

    «  Tu as rencontré quelqu’un ?
    - …
    - Tu as rencontré quelqu’un. »

    Il a ouvert une seconde bouteille. Puis ils sont allés se coucher. Le week-end s’est déroulé presque normalement. La semaine suivante, il s’est mis à la recherche d’un appartement.

    Il pense à cette fête. Il imagine les gens en train de danser. Il aurait peut être pu draguer. Il faut rêver. Avant, Il aurait dit : « je travaille dans une association culturelle » alors que depuis deux ans il dit « je profite de mon chômage ». Hypocrite. Elle sera peut-être là. Il serait peut-être rentré avec elle. Il lui aurait dit : « Tu es retombé amoureuse de moi ? » Elle aurait répondu (en rigolant gentiment) : « Non… ». Il faut rêver. Il serait surement rentré saoul. Il serait sûrement rentré seul. Il se serait sûrement fait chier. Il n’aurait sûrement rencontré personne. Il faut rêver. Comme ça il n’aura pas de regrets.

    En plus il n’a pas envie de retourner dans cet appartement. La dernière soirée qu’il y a passé. C’était peu de temps avant leur séparation. Il se souvient exactement de ce qu’elle portait. Elle s’était habillé avec jean gris, sa paire de Doc Martens et un t-shirt orange avec un éclair sérigraphié. Il était parti plus tôt. Elle était restée. Elle n’était pas rentrée. Elle avait découchée. Ils s’étaient retrouvés le lendemain matin pour le petit déjeuner. Elle a mentie. Sur le moment il n’a rien senti. Mais maintenant il le sait.

    Il savait qu’il regretterait. Il savait qu’il s’en voudrait de ne pas y avoir été. Pourtant il est resté chez lui. Il n’est pas sorti. Ce n’est pas comme ça qu’il va s’échapper du cercle vicieux (ou vertueux) dans lequel il est entré.

    « Qu’est ce que je pourrais dire ? Qu’à pas encore été dit ? Rien d’inédit. A part que… »

    « Mais tout ça tu le sais déjà. Je n’ai rien à te dire de plus. Je ne sais pas ce que je pourrais faire de plus. J’ai l’impression d’avoir tout essayer. »

    Assis dans sa cuisine,
    Il boit une bière. Il se demande s’il devrait en ouvrir une autre ou aller se branler. Il sait bien que quand il est  trop bourré la masturbation est moins intéressante. Il jouit moins. Le dilemme de sa soirée. Aller se branler ou continuer à boire.
    Il pense à elle. Il n’a plus envie. Alors il choisit l’option picoler / aller se coucher.
    Quand ils étaient ensemble, il n’avait pas ces questions à se poser.

    Il aimerait être avec elle.
    En fait il n’arrive pas à imaginer qu’elle est avec quelqu'un d'autre. Il n'arrive pas imaginer qu’ils partent en AirBnb dans les Alpes ou dans le Luberon ou ailleurs. Il ne peut pas les imaginer en train de dormir dans un champ et de baiser dans la voiture. De partir en week-end pour voir ses amis ou sa famille n'importe où au milieu de la France. Il ne peut pas l'imaginer dormir à côté de lui dans le TGV qui mène à Paris, à Bordeaux ou ailleurs. Mais il faut qu’il se fasse à l'idée, elle vit désormais une autre histoire. Il ne les imagine pas en société, avec leurs amis, ou dans un vernissage ou dans un taudis. Il ne les imagine pas au resto. Il ne les imagine pas en vacances. Il ne les imagine pas... en couple. Il ne veut pas. Il n’arrive pas à l’imaginer elle, lui demandant de courir dans la rue, la nuit, juste parce qu’elle a envie de courir. Il ne l'imagine pas lui, lui proposer sa veste parce qu’elle a froid. Il ne les imagine pas tous les deux aux urgences parce que son doigt (ou son genou) s'est infecté et qu'il va peut-être falloir opérer.

    Maintenant elle vit une autre relation. Et il n'y a pas de solution.


    votre commentaire
  • OCTOBRE
    Il a regardé un film d’Hitchcock, dimanche soir, sur Arte. L'Inconnu du Nord-Express. Le crime parfait. Il a parfois eu envie de les tuer. Depuis eux ans, il a eu le temps d’échafauder son plan. Il a regardé suffisamment de films thriller et de séries policières, pour ne pas se faire avoir. Il a plusieurs idées. Le poison, c’est pour les faibles. La bombe c’est pour les fous. Au pire cela passera pour un crime passionnel. S’il la tue, il faut qu’il le tue. Sinon, le chef d’œuvre ne sera pas accompli. Il l’aime trop pour pouvoir lui faire du mal. Il l’aime trop pour pouvoir y penser. C’est bien ça le problème. Lui, il n’aurait pas trop de soucis pour en venir à bout. Le schéma n’est pas aussi idéal. Il faut qu’il réfléchisse. C’est un peu plus compliqué.
    Il faudra mentir. A sa famille, à ses meilleurs copains, aux juges ainsi qu’aux avocats. Il est prêt. Il sera le seul à connaître la vérité.
    Il pourrait

    Elle pourrait ressembler à Sharon Tate ;


    votre commentaire
  • NOVEMBRE
    Il pense à ces années collèges. Il pense à Agathe. Il a été très amoureux d’Agathe. Sa sœur s’appelle Béryl. Ses parents aiment bien les pierres et la géologie. Ils ont eu deux jolies filles. Il n’est pourtant jamais sorti avec elle. Il la regardait, elle était belle. Elle a marquée ces 4 années (de la 5ème à la 3ème mais il a redoublé). Il a eu sûrement plusieurs occasions. Pourtant il n’a rien fait. C’est un con. Il se souvient encore du jour où Edouard l’a embrassé. Il était pourtant décidé. Il passait leurs journées ensembles tous les 3 depuis quelques semaines plutôt que de réviser le Brevet. C’était l’été. Il devait passer leur examen dans quelques jours. Ils sortaient. Ils trainaient dans les rues. Ils ne faisaient pas grand-chose. Ils allaient au parc. La veille il s’était motivé. Avant d’aller se coucher, en écoutant une ballade de Faith No More. Cela devait changer. Il la regardait depuis la 5ème. Assis sur un banc. Dans la cour de récré. A cette époque, elle était une clase en dessous. Quand il avait repiqué, il était presque content en pensant qu’il pourrait se retrouver dans sa classe. Si cela n’avait pas été le cas. Il aurait désespéré. Mais ce fût le cas. Il se souvient de sa joie. Et tout ça pour ça.


    votre commentaire
  • DÉCEMBRE
    En ce moment ils se voient un peu. Ils ne baisent pas. Ils se voient de temps en temps. Un peu plus souvent. Ils ont pris un café hier. Ils ont mangés ensemble la semaine dernière. Ils sont allés boire un verre. Il ne comprend pas pourquoi, mais parfois ils se voient. Il a l’impression de la voir beaucoup en ce moment. Pourtant rien n’a changé.
    Il se demandait s’il valait mieux baiser et souffrir quand l’autre s’en va. Ou s’il fallait mieux s’abstenir pour ne pas avoir mal. Il est malheureux quand elle part. Il aurait préféré baiser. Il aurait aimé recoucher avec elle une fois, ou plusieurs fois, depuis leur rupture. Mais elle ne veut pas. Et il ne lui a jamais vraiment proposé.

    Ils ont pris un café. Ils se sont retrouvés, sur une terrasse. Il faisait beau.
    Elle se laisse pousser les cheveux. Ça Lui va bien. Elle porte un pull vert. Une jupe noire par-dessus son jean. Des Converse all star un peu abimées.  Et des boucles d’oreilles en forme de cintres, assez discrètes. Elle utilise le sac à dos qu’il lui a offert. Il est fier. Et il a l’impression que c’était hier. Ils discutent comme si de rien était. Ils parlent politique, histoire et société. Tout est si simple. Tout coule de source. Ils peuvent dialoguer. Comme si rien ne changeait.

    Ils ont mangés ensemble. Il s’est réveillé. Il était déjà presque midi. Il était entrain de servir un deuxième café, quand son téléphone a sonné. « Si tu veux on peut se faire un plat du jour dans une brasserie ». « Laisse moi juste le temps de prendre une douche, j’en serais ravi.». 

    Ils sont allés boire un verre.
    Puis elle est venue boire un verre chez lui.

    Les autres soirs : soupe. Ça lui permet de manger des légumes. Depuis le début du mois il en consomme beaucoup. Il achète des briques de potage ‘tout fait’ chez Naturalia ou chez Monoprix.
    Eau - carotte 16% - pomme de terre 16% - lait entier reconstitué – oignon réhyfraté 4,5% - céleri-rave 4,2% - chou-fleur 4,2% - navet 4,2% - poireau 3,1% - haricot vert 1% - beurre – sel – persil 0,3% - arôme naturel de céleri – extraits de levure – chlorure de potassium – arôme naturel de poivre.

    Les informations en gras sont destinées aux personnes allergiques.
    Dans celle achetée à la Biocoop, il n’y a que des légumes. Il se demande à quoi sert le reste. Car celle de la Biocoop est aussi bonne, voir meilleure.

    En ce moment, il a tendance à picoler. C’est sûrement l’hiver.


    votre commentaire
  • JANVIER
    Il rentre chez lui. Il est sorti ce soir. Il est allé boire quelques bières avec 2 ami-e-s. Il fête la signature de son contrat de travail. Il vient d’être embaucher dans une petite association. Il s’occupera de la communication. Il a eu de la chance. Son chômage s’arrêtait le 15 janvier et il a trouvé du boulot au 1er février. Professionnellement il n’a jamais été très inquiet sur sa situation. Il voulait sauver les meubles, il ne gagnera pas beaucoup d’argent. Les temps sont durs. Il travaille dans la culture. S’il avait voulu être riche il aurait fait autre chose. Il n’a pas besoin de beaucoup. Il a besoin de temps. Il s’est longuement demandé ce qui le rendrait heureux. Ce qui ferait son bonheur. Il n’a toujours pas trouvé. Il vient de signer un contrat aidé. Il n’a plus de projet. Il ne sait plus ou il en en est. Il a moins d’envie. Il n’a plus de projet de vie. Il s’ennui. Il a moins faim. Il n’a plus 25 ans. 40 ans sans enfants. Il souhaitait changer ses priorités. Et tout s’est effondré.

    Cours Ju direction Réformés. Il n’est pas très tard. Il n’est pas minuit. Qu’est ce qu’il va faire en rentrant. Il peut s’arrêter à l’épicerie et s’offrir 2 cannettes. Il peut rentrer et se mettre devant son ordinateur et regarder une série. En ce moment il regarde Walking Dead. Il s’est abonné à Netflix, il y a 2 ans quand il a quitté son boulot. Quand on est sans emploi, les saisons passent vite. Ce soir il n’a pas envie de s’angoisser. Il n’a pas envie de glander. Il n’a pas envie de se vider. Il ferait mieux de se branler. Si le Spar cours Joseph Thierry est ouvert. Il ira s’acheter une bière. Fumer une clope ou 2 et aller se coucher.
    Il remonte la canebière. L’Épicier est fermé. Tant pis. Il reste une bouteille de blanc entamé dans son frigo. Ce n’est surement pas du vin bio. Mais ça fera l’affaire. Il reste terre à terre.
    Il a une plante dont il doit s’occuper. Il va la rempoter en rentrant. Il monte l’escalier. Il arrive devant sa porte. Son téléphone sonne. Il a reçu un SMS. Peut être que son père lui donne de ses nouvelles, suite à son appel cet après midi. C’est elle. Il lui a envoyé un message pourris jeudi dernier. Il était un peu bourré.

    TU ME MANQUES.

    Il a tout écrit en capitale et il a insisté sur le point. Le point est important. Elle devrait comprendre. Elle n’a rien compris. Peut être qu’elle la fait exprès. Elle a bien fait.

    J’ai toujours une écharpe à toi. Il faudrait que tu passes la chercher. Désolé en ce moment j’ai beaucoup de boulot je donne pas beaucoup de nouvelles. Bisous.

    Un peu déçu par cette réponse. Il se dirige vers le Frigidaire. Il prend un verre à pied dans le placard. Il prend la bouteille de cassis sur l’étagère. Il se prépare un kir. Il sort quelques olives. Il met un peu de musique. Il apair son téléphone et son enceinte bluetooth. Il choisit d’écouter Metronomy.
    Il ‘est créé un profil sur Happn récemment. Il devait écrire un texte de présentation. Il réfléchit. Il a envie d’écrire : « Alors… J’ai pas envie qu’on fasse chier. Je suis pas si mal tout seul. Je suis peinard. Je fais ce que je veux. Je regarde ce que je veux à la télé. Je me lève à l’heure que je veux. Je fais ce que je veux. L’amour, honnêtement, j’y crois plus. Si cherche un à te marier. Si tu as bientôt 40 ans, que tu veux un enfant. Si même tu cherche simplement une relation sérieuse. Passe ton chemin. En fait j’ai juste envie de baiser. Les boudins qui se prennent pour des princesses, parce qu’elles ont 300 matchs / jours, dîtes-vous bien que les hommes se sont fait une raison, et que, pour avoir ne serait ce qu’une réponse, si on ne ressemble pas à Robert Pattinson, il faut liker 300 pages / jours. Si ce message te donne envie d’en savoir plus, tente ta chance… ». Il se dit qu’il ne risque pas de rencontrer beaucoup de femme en se décrivant ainsi. Alors il écrit : « Je ne sais pas ce que je cherche… » Il choisit une photo beau gosse. Il n’en avait pas dans les galeries de son smartphone. Alors il fait un selfie dans son salon, devant une affiche de Basquiat. Histoire de planter le décor. Il trouve cela plus intelligent que de se mettre torse nu dans sa salle de bain, le sourire crispé parce qu’il contracte ses abdominaux.
    Avec plus de 80 millions d’inscrits, happn, c’est l’application de rencontre qui vous permet de retrouver toutes ces personnes que vous avez croisées et que le destin a mises sur votre chemin. Likez les personnes qui vous plaisent, Crushez, et surtout, rencontrez-vous ! (source : https://play.google.com/store/apps/details?id=com.ftw_and_co.happn&hl=fr)
    Il a choisit Happn plus que Tinder, car n’étant pas à la base très convaincu, il pense que s’il croise une fille dans une expo de Philippe Pareno au Palais de Tokyo, d’Hundertwasser à la Vieille Charité, dans un concert de Sleaford Mods au Trianon ou de Usé à l’Embobineuse, elle sera peut être un peu moins conne qu’une autre.
    Il termine la bouteille de blanc. Et sur ces réflexions constructives, il va se coucher.


    votre commentaire